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La
Garde en Oisans Au
fur et à mesure de mes recherches généalogiques, j'ai pu
renconstituer de manière partielle évidemment
l'histoire du petit village de LA GARDE EN OISANS. |
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Ephemerides historiques
Les hameaux et leur origine |
Colportage à La Garde et dans l'Oisans
La descente des colporteurs Uissans était une des annonces
de l'hiver. Dès la fin octobre, on les voyait se masser au
Bourg d'Oisans et s'engager sur l'étroite route de la vallée
de la Romanche pour aller faire leurs provisions de
marchandises à Grenoble ou à Lyon avant de commencer leur
tournée.
Les colporteurs ont laissé une image pittoresque,
sillonnant les villages et les hameaux, la balle au dos,
sortant de sa hotte ou de son grand sac, les menues merveilles
fabriquées en ville. Mais, c'est plus pour survivre, vu le peu
de ressources que leur rapportait leur métier d'agriculteur
qui poussèrent ces hommes des montagnes à se déplacer hors de
l'Oisans.
Une origine lointaine :
Déjà, en 1412, un texte nous indique une émigration
temporaire qui a "pour but de fournir aux paysans de l'Oisans
l'occasion de gagner de l'argent dont ils ont besoin,
principalement en vue de payer l'impôt, argent que leur terre
ne peut leur fournir en suffisance".
En 1428, leur destination et leurs occupations sont
indiquées par un texte : Grenoble, en Provence et dans le
Comtat, de nombreux Uissans vont tirer les bateaux de sel sur
le Rhône.
Mais les mots "misère, misérable" sont souvent répétés dans
les textes et les doléances indiquent "que tel ou tel habitant
est parti mendier".
En 1458, un texte indique que cette émigration temporaire
s'étend de Toussaint à Pentecôte.
Au 17ème siècle, j'ai recensé au moins dix
marchands officiels dans les familles CHOUVIN et
PELLISSIER.
L'apogée du colportage se situe après 1850 mais diminue
avec la fin du siècle. Dans les recensements de 1886, 36 % des
chefs de famille se déclarent colporteurs, seulement 7 % en en
1911 et 3% en 1921. Nous n'avons pas de recensements précis
auparavant mais il serait vraisemblable d'avancer que 4/5ème
des familles colportaient vers 1850.
J'ai étudié sur La Garde les naissances depuis 1737 (date
des premiers registres que la commune possède) et les
conclusions en sont éloquentes. Autant au 18ème
siècle, les naissances sont plus ou moins réparties sur les
douze mois de l'année, autant au 19ème siècle, et
notamment les décennies 1820 - 1890, il y a un déficit de
naissances manifestes durant les mois de juillet à septembre.
La moitié des naissances se situent entre janvier et mars. Il
y a donc bien une présence familiale forte entre avril et
juin, et des départs importants entre novembre et janvier.
Le colportage cachait une grande misère et nombre de
colporteurs sont morts sur la route ou en prison. J'ai pu
avoir des archives communales un « état des condamnations
de plusieurs individus de la commune de La Garde » dressé
par le Maire de la commune en 1856 et qui atteste de la
difficulté que rencontraient tous ces hommes :
Extrait de l'état des condamnations de plusieurs individus
de la commune de La garde
1. Tribunal de commerce de Grenoble
opposant Ferréol ARNOL, non réhabilité le 8 septembre 1848, à
Hugues CHALVIN et Pierre SONNIER
2. François GLODAS, prévenu de vol, condamné à
13 mois de prison par le Tribunal de Saint-Marcellin le 22
février 1842
3. Louis Frédéric VIEUX PERNON, déclaré
coupable de vol, condamné à 30 mois de prison par la cour
d'assises de Périgueux le 20 juin 1845
4. Augustin PELLISSIER, condamné à 13 mois de
prison pour mendicité et menace par le tribunal de Bourg en
Bresse le 13 juillet 1849
5. Philippe VIEUX PERNON, déclaré coupable
d'escroquerie, condamné à 10 jours de prison, Pierre VIEUX
PERNON, son frère, condamné pour le même fait à 20 jours de
prison, par le tribunal correctionnel de La Rochette le 16
novembre 1849, condamné pour récidive pour le même fait par le
tribunal de Napoléon Vendis le 1er février à 1 mois
de prison.
6. Philippe VIEUX PERNON, déclaré coupable
d'escroquerie condamné à 2 mois de prison par le Tribunal
correctionnel de Limoges le 18 mars 1847
7. François ROUX, déclaré coupable
d'escroquerie faisant la partie illégale de la
médecine, condamné à 1 an et un jour de prison
dans la maison centrale de Fontrevaud par le Tribunal de
Nantes le 21 janvier 1854
8. Louis VIEUX PERNON, déclaré coupable
d'escroquerie condamné à 1 jour de prison par le Tribunal de
Napoléon Vendis le 1er février 1855
9. Jean PELLISSIER, déclaré coupable
d'escroquerie à 15 jours d'emprisonnement par le Tribunal
d'Autun (Saône et Loire) le 9 février 1852
10. Alexandre CESARD, déclare coupable à 1
mois de prison pour vol par le même tribunal, même
jour
11. Antoine ROUX, condamné à 13 mois
d'emprisonnement pour s'être rendu coupable d'escroquerie et
Claude VIEUX VIGNON, condamné à 14 mois d'emprisonnement pour
escroquerie par la cour d'assises de Fontevraud le 4 mars
1856
Cela représente qu'une petite partie des condamnations,
nombres de colporteurs se sont retrouvés ruinés et acculés à
la faillite et à l'expropriation de leur terres, tel Jean
VIEUX, maire de La Garde, qui avait en 1845 près de 50 000
francs de dettes.
Les documents des colporteurs

Ici contre, la patente d'un marchand forain avec bête de
somme concernant François VIEUX PERNON ROCHAS de l'Armentier.
La patente était obligatoire : « Les marchandises mises en vente
sans patente pouvaient être saisies ou séquestrées aux frais
du vendeur. »
Tout colporteur devait tenir « un livre journal, un
livre d'inventaire ».
Il est important de constater le nombre important de
personnes de La Garde lettrés à cette époque, plus de 80 %
savaient signer au 19ème siècle.

D'autres colporteurs n'avaient que leur balle avec eux,
c'est le cas en général des colporteurs merciers.

Tout comme la patente, voyager nécessitait de la part de
tous les colporteurs un passeport de l'intérieur.
C'est une véritable mine de renseignements pour la
description de nos ancêtres en l'absence de la photographie
que fournit ce passeport renouvelé chaque année.

François Vieux Pernon décrit avec minutie ci-contre pour un
de ces derniers voyages, il devait décéder cinq années plus
tard : barbe châtaigne, visage ovale, teint un peu
coloré, sans premier doigt de la main droite..
Les colporteurs se faisaient livrer leurs marchandises
souvent dans des points de relais où les auberges tenaient le
premier plan. Leur correspondance est très nombreuse.


Ci-dessus le carnet de route appartenant
à Jean Vieux Blondin, on peut s'apercevoir des différentes
haltes que ce colporteur accomplissait.
Les spécialités du colportage
Les deux plus importants sont sans contexte la
rouennerie et la mercerie dont les colporteurs de La garde
sont majoritaires.
Les balles des merciers étaient
plus légères contenant fils, aiguilles, épingles et pelotes,
laine et coton à repriser ; c'est le colportage le plus humble
sans mise de fonds ni grande habileté à l'usage de ceux qui
n'avaient rien.

Celles des rouenniers
représentent un colportage plus riche avec tissus, toiles et
articles de laine. Si à l'origine, ce commerce servait à
écouler la fabrication des tisserands locaux, il devient vite
un véritable commerce où les colporteurs cherchent leur
marchandise à Grenoble, Lyon voire Paris.

Commande pour Jean Vieux en 1845, où l'intéressé commande
tout un assortiment de bonneterie chez l'entreprise PALLIAS à
Lyon : bas, pantalon, gilet, gant, chausson, chaussette,
etc.
D'autres exemples de grands magasins de bonneterie,
cette-fois ci à Limoges.
Articles de bazar et quincaillerie
Ces produits multiples
nécessitaient pour les étalagistes un véritable bazar sur roue
traîné par un cheval ou un mulet. Ces colporteurs sont devenus
de véritables commerçants que l'on retrouve tout au long des
actes notariés à partir du 16ème siècle.

Comestibles
A l'origine, le colporteur
exportait certaines denrées de la montagne mais au 19ème
siècle, elles ont cessé d'y jouer un rôle. De la petite
épicerie roulante, certains sont devenus des épiciers en gros
ou des marchands de liquides, telle la famille VIEUX PERNON de
l'Armentier dont certains représentants se sont installés dans
la région de Bordeaux.
Ci-contre chocolat, café acheté à Limoges en 1845
Une spécialité de La Garde : Droguistes, herboristes et
aussi charlatans
A l'origine, tous les
porte-balles transportaient avec eux des herbes qui avaient
bien sur toutes sortes de vertus, comme le thé des Alpes ou
l'Arnica. Au fur et à mesure, l'espèce d'armoire en osier se
transforma en meuble léger à tiroirs où les remèdes de
l'herboriste étaient soigneusement rangés. Mais les remèdes
étaient le plus souvent anodins et sans grande efficacité, le
talent d'orateur du colporteur était alors essentiel. Une
anecdote célèbre précisait que le colporteur se rendait tôt le
matin dans une étable d'un village proche pour mettre du poil
à gratter aux vaches afin de les incommoder, et quand il se
rendait peu après, il les guérissait triomphalement.
J'ai retrouvé dans les archives
de ma famille quelques remèdes miracles dont je vous fais
part, ceux-ci font plus penser à des poudres de perlimpinpin
que de véritables médicaments !



Les seigneurs du colportage : lunetiers et
fleuristes
- La lunetterie est le colportage
le plus récent apparu après la guerre de 1870, elle
s'approvisionnait principalement à Morez en Jura où la famille
PELLISSIER des Ribots s'y est même installée. La valise du
lunetier renferme des verres et des binocles, un trésor de
richesse que le porte-balle, le plus riche des colporteurs
Uissans, manie avec grande habileté.
-les fleuristes sont les seigneurs du colportage. Si la
plupart sont originaires de Venosc, La Garde abrite un des
plus célèbres en la personne de Claude CHOUVIN. Le Musée
Dauphinois a exposé plusieurs de ses lettres et
représentations de fleurs et Jean-Louis BEAUCARNOT l'évoque
dans son ouvrage sur les colporteurs :
« La vie de Claude
Chouvin, marchand fleuriste originaire de La Garde, est
parfaitement exemplaire. Amené à la profession par un
beau-frère, il entreprend, entre 1894 et 1901, plusieurs
campagnes, qui le conduisent successivement à San Salvador, au
Chili et à Rio de Janeiro, d'où il rapportera en une seule
visite une véritable fortune. Rapidement, il acquiert un
hangar à Angers, où il stocke sa marchandise. Il investit dans
la publicité, publiant des annonces dans les journaux, se
faisant imprimer des catalogues où les fleurs sont dessinées
par des peintres-artisans spécialisés, des planches
somptueuses présentant l'amaryllis pourpre au cour doré, la
gentiane bleue aux étamines d'or ou encore l'aralia
rouge. »
En effet, de nombreuses planches de fleurs étaient
dessinées et coloriées avec beaucoup de soin afin de donner
aux acheteurs éventuels une impression de vérité. Ces plantes
d'ornement étaient des marchandises de luxe, la clientèle se
trouvait en ville ou pays riches et entraîna les colporteurs à
une expatriation lointaine jusqu'en Russie, l'Asie et toute
l'Amérique !

Félix VIEUX, de La Ville, a commandé à Belfort tout article
de lunettes (précisé de Morez) et de coutellerie
Les pays visités
Si les plus pauvres se contentent d'arpenter le Dauphiné
même, la plupart des voyageurs fréquente les pays du
Centre : Auvergne, Limousin, centre sud et ses
abords. Le centre de livraison se situe à Lyon ou
Moulins.
L'Est est un monopole des hommes de
La Garde et des communes avoisinantes, Huez et Auris avec les
colporteurs lunetiers. Le réseau familial y joua un rôle
prépondérant avec un centre de livraison à Morez en
Jura.
L'Ouest et le Sud-Ouest ont connu
les colporteurs spécialisés dans le voyage du commerce en
alimentation, peu de personnes de l'Oisans y sont attestées,
seule une famille de La Garde, les VIEUX PERNON, semble y
avoir réussi.
Les pays lointains : de
nombreux exemples attestent que les colporteurs n'ont pas
hésité à franchir les frontières de l'hexagone pour accroître
leur commerce en possédant en France de nombreux comptoirs à
Paris, lieu de livraison, mais aussi dans les principaux ports
maritimes. Le monde méditerranéen leur semblait même petit et
ils n'ont pas hésité à parcourir les nouveaux mondes dont
l'Amérique. On imagine l'habileté de ses hommes au départ sans
éducation et qui durent apprendre des langues diverses.
Les Correspondances
Les différentes correspondances entre les colporteurs et
leurs familles restées à La garde sont une mine de
renseignements et d'anecdotes en tout genre. Elles sont
souvent émouvantes et témoignent de la dureté de la vie au
19ème siècle.
Je vous livre des extraits de quelques lettres qui me sont
parvenues
Lettre du 27 juin 1849 de Jean Vieux Blondin à
sa mère et sa famille
Mes chers parents,
Présente est pour vous annoncer qu'au moment
où je me disposais à quitter le pays, ma mule est tombée
malade. Je l'ai fait saigner et placer un téton d'après l'avis
du vétérinaire. Je lui donne également du miel, car c'est une
maladie qui a du rapport gourmet, elle tousse beaucoup et ne
répond guère. Je m'en irais à petites journées et attendrais
si la maladie devient plus grave. Vous voyez quel bonheur j'ai
avec mes bêtes. Il est inutile que je vous parle de mon cheval
entier quoique bon, tôt au tard il me fera du désagrément. Je
suis parfaitement guéri de la manie du bégaillement. Donc
qu'elle crève ou qu'elle guérisse. C'est bien fâcheux, car
j'étais parvenu à amasser près de 1500 écus, et il me reste un
peu de marchandises. Les récoltes ici sont très belles, il y a
beaucoup de foin. Une chaleur de forte et pas de pluie, cette
température engendre beaucoup de maladies. Tâchez de faire le
mieux.
Dimanche vous allez beaucoup vous amuser avec
l'ami Vieux Combe. Il a très bien choisi. Adélaïde est une
bonne personne, économe, et qui n'a eu de faiblesse que pour
se faire une position. Je m'aperçois que la philosophie a fait
chez lui d'immenses progrès. Lui seul a su mettre de côté le
préjugé.
Si Adélaïde m'eut voulu, je l'eusse épousé
avec beaucoup de plaisir. Je n'ai pu vous écrire plus tôt pour
ne pas troubler votre fête, le bon Saint-Pierre. Mes
compliments à tous nos amis et voisins, n'oubliez Jacques
Vieux fils, enfin tous, Janviotte, notre cousin, Jean Sonnier,
sa femme et Pierre Sonnier, son bon diable.
. Pour quant à Jules, mon frère Henry sera
tenu de lui donner 1000 fr .. je donne la jouissance de tout
cela à notre mère. Cependant si Pierre vient à perdre par
malheur son oil, ce qui n'est pas, je prie Dieu, c'est à lui
que je donne tout ce que je puis avoir. Vous allez sans doute
me prendre pour un fou, mais il n'y a pas à s'y fier, mes amis
sont morts subitement.
Les affaires ainsi réglées, je vous embrasse
du plus profond de mon cour.
Jean Vieux Blondin
Lettre du 26 mars 1850 à Saint-Fort sur
Gironde de Jean Vieux à sa mère
Mes chers parents,
Je viens de Bordeaux où j'ai vu le pauvre
père Philippe Vieux Pernon à l'hôpital, atteint d'un ulcère à
la jambe dont il aura beaucoup de peine à se relever, et à
franchement parler, je crois qu'il est perdu. J'ai eu moi-même
une douleur aux reins qui m'a cloué quatre jours sur mon lit.
J'ai voulu porter 40 k de mon auberge au bateau à vapeur,
c'était de la mitraille, j'ai attrapé chaud et froid. Voilà la
véritable cause de ma douleur. J'ai reçu à Mortagne une lettre
de l''Henry (son frère) qui m'a causé beaucoup de joie, je
n'ai pas cru devoir lui faire réponse, parce que j'ai pensé
qu'il serait parti pour le pays.
Depuis le carnaval jusque il y a huit jours,
nous avons eu le plus beau temps du monde, mais ce matin il
gèle à pierre fendre, il fait un vent furieux, hier il tombait
de la giboulée ; j'ai vu avec plaisir mon neveu pouvoir
déjà se faire comprendre, je l'engage à continuer ainsi que le
Jules qui me paraît être un petit bourriquet. J'ai été fâché
de l'accident de notre ami le Fils, ce maudit pommier bouffard
me fit éprouver le même accident à l'âge de 9 ans. Ses filles
auraient été à même mieux de faire cette besogne que
lui ; vous ne me parlez pas du tout de mon frère, s'il
est allé faire une petite tournée. vous souhaiterez le bonjour
de ma part à l'Angélique, à toute la famille, et la ruche ne
l'oubliez pas, donnez moi des nouvelles du bétail et de celui
de l'Henry. rien de nouveau ici, les affaires vont
médiocrement, cependant, je viens de faire une bonne tournée
(3000 fr en deux mois). Le gouvernement rétrograde et ne suit
nullement l'impulsion qui fut donnée dans le principe. C'est
le régime du sabre qui est la meilleure de toute la
raison.
Vous me ferez réponse de suite à Rochefort,
poste restante (Charente Inférieure).
Le bonjour à notre ami Vieux le fils, à sa
famille, à nos voisins Lalan et au peupleur de la Laponie, à
sa femme et à tous ceux que la circonstance vous l'inspirera,
n'oubliez pas le maire, c'est un bon diable. N'oubliez pas non
plus nos oncles François et Pierre s'il est au pays.
Je vous embrasse du plus profond de mon
cour.
Jean Vieux
Lettre de janvier 1852 de Marie Vieux à son
époux Pierre Sonnier
Le style est différent des autres lettres, je la livre sans
corriger les fautes, on imagine les femmes laissées seules au
pays et livrant par leurs courriers les nouvelles de chacun.
On assiste à chaque lettre aux décès des marchand colporteurs
loin de leur pays - ce courrier est adressée à « Monsieur
Pierre Sonnier, marchant aux anvirons Oyonnax, poste restante
aux Oyonnax, département de l'Ain » -
Mon cher époux,
Je répons a la lettre qui mapprent que tu
jouisait d une bonne santé pour le moment, Grace a dieu, je
désire que la présente te trouve de même pour quant à moi je
me porte très bien pour le moment ainsi que nôtre mère qui se
porte bien pour le moment ainsi que notre oncle qui ce porte
bien pour le moment.
Ainsi que nos deux enfants qui vont à l'Ecole
il y a un moi. Chèr époux nous avons reçu une lettre de nôtre
frere qui se porte bien pour le moment qui te fait bien des
compliment ainsi que hanri qui a ecri il y a un mois qui se
porte bien pour le momant et qui te fait bien ces compliment
ainsi que l'angélique qui se porte bien pour le moment et qui
te fait bien ces compliment, rient autre chose a te dire pour
le moment, je fini ces deux mot ent tanbraçant de tout Mon
cour ainci que nos deux enfant et notre oncle et nôtre Mère.
Marie Vieux
Si joubli à te dire qui il y a rien, les
nouvaux du pay il y a jaque vieux Rochat qui et décédé à usel
il (y a) un moi dune maladie influcsion de poitrine qui et
mort dans 7 jour, il y a rien de nouvau a te dire pour le
moment a la maison tous nos voisain se porte bien pour le
moment ainci que le mulé de notre frère jan
vieux.
Lettre du 26 mars 1864 à Saujon de Jean Vieux
Blondin à Henry VIEUX, son frère
Cher ami frère,
Je m'empresse de répondre à ta lettre que tu
m'as adressée à Royan. Je suis on ne peut plus satisfait de
voir ta bonne santé ainsi que celle de Jules. Déjà par une
lettre de ma femme, je savais que la tienne avait accouchée
d'un garçon, ce qui m'a comblé de joie de voir que c'est un
mâle, parce que les pauvres filles sont trop malheureuses dans
ce siècle-ci. Les garçons avec leurs couilles au cul peuvent
toujours se sauver. Il n'y a rien de nouveau au pays,
j'attends la délivrance de ma femme qui malheureusement n'est
pas forte. Ces jours-ci je dois recevoir une lettre et selon
les nouvelles du pays je t'écrirai à Roanne pour le 10 avril,
mais s'il n'y a pas de nouveau, je ne t'écrirai pas, au
contraire aussitôt que tu seras arrivé au pays tu me feras
réponse à Royan, hôtel de la Croix Blanche. Tu me détailleras
le mouvement général du pays. Ce mot renferme tout.
Je vois avec peine que nos compatriotes font
des sottises tellement grandes que plusieurs mandats d'arrêts
sont décernés contre eux, hélas, hélas, cela finira mal.
Rien de nouveau au pays pour le moment. Je
vends assez et ne me ^plains pas trop mais malgré cela je
m'ennuie de tout, c'est que quand on est vieux, on devient
grognon, tout vous fait déplaisir. Bientôt cher frère, nous
nous reverrons pour nous embrasser avec la plus grande
effusion de cour. C'est dans ce vif espoir que je t'embrasse
ainsi que le Jules.
Ton frère dévoué. Jean Vieux
Blondin
Le déclin du colportage
Le développement industriel offrant des occupations d'hiver
plus attrayantes, la facilité des voies de communication, le
dépeuplement rural réduisant le commerce intérieur, ont pour
conséquence dès la fin du 19ème siècle le déclin du
colportage. La première guerre mondiale et ses conséquences
démographiques dramatiques mettent fin au colportage à
quelques exceptions près.
Référence :
« Les colporteurs de l'Oisans »
de C. ROBERT-MULLER et A. ALLIX, réédité en 1979, Presses
Universitaires de Grenoble
« Le voyage et la mémoire »
de Laurence FONTAINE, 1984, Editions Presse Universitaire
de Lyon
« Quand nos ancêtres partaient pour
l'aventure »
de Jean-Louis BEAUCARNOT. Editions
Latt |